[…] C’est dans une ambiance d’enthousiasme et de vivacité que nous avons fait de notre
mieux pour accompagner nos élèves avec lesquels nous avons tissé de véritables liens
solides afin de les aider à combler leurs lacunes scolaires.
Cette expérience s’est avérée être plus profonde que ce à quoi on s’attendait.
Avant toute chose, elle nous a permis de constater et à l’unanimité que le programme
national du brevet a désespérément besoin d’être reformé et qu’il est très urgent de
briser sa fixité et son manque aberrent de pédagogie. Les temps ont changé et notre
brevet est anachronique. Nos jeunes Libanais ont besoin d’un programme plus flexible,
en harmonie avec la mondialisation et qui puisse s’aligner peut-être avec le modèle très
réussit du brevet français. Et là-dessus nous nous sommes promis Liwaa et moi, de
dévouer une partie de notre temps et plus tard dans nos vies professionnelles à
l’amélioration du niveau de l’éducation nationale.
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Ensuite, a resurgit des abysses de nos refoulements communs la question de l’efficacité
des écoles publiques. 77% des élèves libanais vont dans des écoles privées. Ce chiffre
traduit immédiatement la méfiance des libanais envers nos écoles publiques. Une
méfiance correctement motivée. Il est impératif de changer l’Etat des choses. Tous les
élèves n’ont pas eu nécessairement la chance de recevoir l’éducation que j’ai eu, que
mes parents ont réussi à me donner -et auxquels je serais éternellement reconnaissant parce qu’ils ont pu la payer et à un prix cher. L’éducation de base doit être accessible à
tout le monde et doit être dispensée de bonne qualité. Cette expérience nous a
transformé. Nous sommes devenus plus sensibles et plus réceptifs à l’injustice qui règne
dans notre monde. Elle nous a permis d’éclater nos bulles privées et de comprendre les
états et les besoins de la très forte majorité de nos concitoyens. Nous avons retenu la
chance qu’on a de vivre notre vie sans se préoccuper des problèmes auxquels les autres
sont confrontés tous les jours si ce n’est toutes les minutes. Nous étions les héros de ces
élèves, qui attendaient avec impatience nos cours pour pouvoir apprendre et aller de
l’avant. Pour eux, ces deux heures que chacun de nous leur consacrait chaque semaine
valaient tout l’argent du monde. Et nous étions fiers d’être leurs champions, et heureux
de voir que tous nos efforts portaient leurs fruits. Des élèves m’ont un jour confié que
dans leur école il n’y avait pas de classes de cinquième et de quatrième séparées, qu’ils
prenaient des cours de cinquième les avant-midis et de quatrième les après-midis et que
le toit de leur classe risquait de rompre et de s’effondrer sur leurs têtes à tout moment.
Et c’est pourquoi je convie tous mes concitoyens à se joindre à nous dans les actions et
missions humaines.
Comme je l’ai souvent dit, et que je ne cesserai sans doute jamais de le dire, la lutte
pour les droits fondamentaux n’est pas exclusivement réservée aux juristes. Nous, nous
nous occupons, de la partie légale. Et il y a comme sous-jacent tout ce qui reste de
l’iceberg ! Quoique vous fassiez dans votre vie, que vous soyez musicien, psychologue,
médecin, homme de lettre, metteur en scène, etc. ce combat vous concerne. Il nous
concerne tous et nous devons travailler main dans la main.
Certes, il n’y a pas de droit fondamental qui soit plus important qu’un autre. Mais à mon
humble avis le droit à l’éducation se réserve un caractère très autonome et pertinent.
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C’est le droit qui permet à toute personne raisonnable de pouvoir accéder à ses autres
droits et de les transcender. C’est ce droit qui détermine le développement humain d’une
société et qui lui permet de progresser. Mesdames messieurs, nous Libanais avons la
matière première, preuve en est nos étudiants excellent à l’étranger. Tout ce qui nous
manque c’est les outils nécessaires à l’exploitation de cette matière première. Il faut
alerter l’opinion du public qui a perdu espoir et attirer l’attention du peuple sur
l’importance d’une bonne éducation. Ce droit sacré ne doit jamais être un simple
observateur aux droits prévus par une constitution ou simplement figurer à titre
énumératif dans son préambule. Il faut qu’il soit le cœur de celle-ci, et l’âme du peuple.
Dans nos vies, nous allons être exposées à des situations qui n’ont pas été appréhendées
à l’école ou à l’université. Nous avons en nous le pouvoir de changer. L’autre jour,
quand j’ai demandé à l’un des professeurs de ma faculté pourquoi il nous avait donné
un sujet d’examen qui portait sur une phrase transversale dans un cours de 400 pages –
pratique courante a la faculté de droit ! – Il m’a répondu « c’est parce que vous devez
apprendre à remanier vos connaissances avec conscience. Vous en êtes capables ! »
Nous donc, sommes capables d’améliorer et nous le ferons.
J’aimerai conclure sur les paroles très puissantes de Malala Yousafzaï Prix Nobel de la
Paix déjà à 17 ans qui dit : « Je veux l’éducation pour les enfants de tous les terroristes
» Parce que pour elle, l’éducation est capable d’anéantir toute forme d’extrémisme et
d’ignorance qui mettraient en péril le progressisme sociétal. Enfin, je trouve que la
devise de la Compagnie de Jésus et par conséquent celle de notre université : « ad
majorem Dei gloriam » qui se traduit en français « à la plus grande gloire de Dieu »
prend tout son sens dans l’aide d’autrui et le respect de l’autre.
Nakhlé Hamouche.